mardi 8 juin 2010

Autre reprise : SPIELBERGER

Christophe SPIELBERGER, Touché, Seuil, Paris, 1999 (173 pages).

L'auteur m'ayant fait parvenir son Superbe de toitu et autres récits, publié chez parfois.fr, je suis retourné à son premier roman, du moins le premier de lui que j'ai, naguère encore, lu; voici les notes que j'avais, il y a dix ans, rédigées.

Pour causer branché, je dirais de ce roman qu'il déménage : déconcertant, abracadabrant et invraisemblable (à tout prendre, pas plus qu'un discours politique).

Voici l'histoire d'une famille, comme il est en tant, c'est à dire qu'elle est unique ; une famille qui comme tant d'autres a des secrets qui, l'alcool aidant, se dévoilent au chapitre 12, vers la page 155.

Cendre a trente ans, et est chauve comme une planète. Elle est fille de Marcel et de Renée et mariée à Franz, son cousin ; mais Marcel aime les garçons, c'est à dire qu'il aimerait bien Franz, mais il se rabat sur l'alcool et la photographie, ce qui permet de fantasmer à bon compte.

Il y a aussi un éphémère petit frère, dont le sort aurait bien intéressé l'assistance publique et toutes les bonnes âmes, sans compter le bon docteur Freud, mais grâce au ciel nous sommes dans un roman inhospitalier pour les bons sentiments.

Cendre partit un jour de la campagne « Quelle est belle la vallée », – vallée d'une campagne dont on ne saura rien, à quoi bon déjà que c'est pas la ville, et pourtant omniprésente – mais le voyage sera parsemé de catastrophes et d'aventures cruelles.

L'attention du lecteur est sollicitée par le récit parallèle, mais comme en sens inverse, de ces aventures et de l'histoire de la vie de Cendre, depuis sa naissance jusqu'à ses trente ans, jusqu'à la conclusion du roman.
Ces aventures sont vécues comme une re-naissance : Cendre n'est-elle pas appelée trentenaire ou femme re-née au Glossaire  annexé au roman ? Pourtant on meurt beaucoup dans ce roman, à pied, en train, en ville, sous la table ou même d'usure de la vie.

Au détour, on apprendra que Franz joue un autre rôle dans le roman que celui de baiseur athée converti au mysticisme et à l'alcool après avoir succombé aux avances pressantes de Marcel, qui n'a d'yeux – et autres organes – que pour lui.

Un indice, ici, ce n'est pas un Marcel qui serait le Narrateur…

Le roman fini – plus vrai que la réalité, pour notre plus grand bonheur de lecteur –, on se rappellera que la littérature ce n'est que des mots dans un certain ordre assemblés, c'est aussi un souffle, un style : l'auteur les a, en dépit de quelques maladresses.

Pour moi, j'ai revu, en tournant les pages, le meilleur Christiane ROCHEFORT et, chez nous, le Réjean DUCHARME des débuts et aussi, le Gaétan SOUCY de La petite fille qui aimait trop les allumettes.
Oui, un roman pour renaître de ses cendres, tout comme le phœnix de la légende.

Voir : http://www.spielberger.net et, sur http://www.00h00.com
On part, nouveau roman, accompagné d'un clip vidéo et le Manifeste contre le roman d'élevage, que l'on trouve sur son site :
1. Contre les histoires dont on devine la fin au bout de vingt pages.

2. Contre l'autobiographie déguisée, dont on a le culot d'essayer de faire un genre sous le terme décourageant d'« autofiction ».

3. Contre le réalisme racoleur, où des personnages insipides nous font croire que leur existence présente un intérêt.
4. Contre l'érudition historique, à travers laquelle des premiers de la classe tentent de pallier leur manque d'imagination.

5. Contre le copier-coller, où l'on confond « avoir du style » et « posséder un ordinateur ».

6. Contre le confort éditorial, où l'usage veut que l'on se conforme à la « couleur maison ».

Aucun commentaire: