dimanche 6 avril 2008

Le boulevard périphérique

Henry BAUCHAU, Le boulevard périphérique, Actes Sud, Arles, 2008 (255 pages).

Le boulevard périphérique, c'est la basse continue de ce roman. Le périphérique, c'est ce qu'il y a autour de la ville, traversant les quartiers éloignés du centre de la ville, de part et d'autre de ses limites. Le plus court chemin entre deux points étant un cercle, car en automobile point de vol d'oiseau. Le plus court chemin en principe, car pour ce qui est du temps, l'anneau périphérique ne réserve qu'embarras, bouchons et lenteur. On peut aussi voyager à la périphérie d'une vie, de souvenirs : le roman devient alors le périphérique de la littérature. En attendant, il perment au narrateur de se rendre à l'hôpital.

Il s'y rend aussi en bus et en métro et, si le trajet n'est pas moins long, il laisse le narrateur libre de penser et de revenir plusieurs années en arrière. Le temps de lire aussi; que lit-il, lui le psychanalyste, en attendant l'autobus pour aller visiter l'épouse de son fils, mourante du cancer ? Histoire de la mort en Occident de Philippe Ariès : Les vivants étaient aussi familiers avec les morts que familiarisés avec leur mort. Ce roman est celui d'une familiarité avec la mort, où le narrateur est familier avec un mort : Sébastien. Le passé, lui, n'est pas mort, à la fois exaltant et douloureux, celui du temps de la guerre, et de la rencontre avec Sébastien.

Un autre personnage hante le roman, Shadow, celui qui, russe blanc au service des Nazis, sera le bourreau de Sébastien. Deux manières d'être, l'un ancré dans la terre, l'autre, alpiniste, tout à la verticale.

Pour le narrateur, l'ombre et la lumière. Une lumière qui l'a ébloui, dans sa nudité, et l'a touché au plus profond de son être. La mort est passé par là, autrefois, elle rôde encore, et se manifestera encore. Le périphérique, lui, nous rapproche, lentement, de ce qui n'a pas été dit, de ce qui est demeuré inconscient. Ce qui n'a pas été dit sera écrit, lentement. Longtemps après.

Que se serait-il passé si... ? Ce qui est fait est fait, pour le narrateur, une vie vécue en survivant avec le seul souvenir. Puis l'écriture, découlant du besoin d'écrire, sera le périphérique qui mènera le narrateur à sa vérité. La découvrir avec lui nous permettra de l'accompagner sur son chemin d'ombre et de lumière.

C'est un chemin qu'il est beau de faire.

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