mardi 19 juin 2007

L'auteur ! L'auteur ! (suite)

David LODGE, L'auteur ! L'auteur !, Rivages/Roman, Paris, 2005, (414 pages). Traduit de l'anglais par Suzanne V. Mayoux, titre original : Author, Author, 2004.



Le roman s'ouvre dans les semaines qui précèdent la mort de Henry James, et se termine à la mort de celui-ci. Entre ces deux chapitres, avec quelques allers-retours dans le temps, le lecteur suivra, pour l'essentiel, la carrière de l'auteur après son installation définitive en Grande-Bretagne. Sera tout particulièrement mis en lumière la volonté d'assoir, tant en ce qui touche la renommée que sur le plan financier, sa carrière, en explorant une nouvelle voie, celle du théâtre, qu'il juge plus propice à lui apporter le succès.

Lodge nous montre aussi les amitiés de James avec d'autres auteurs, dont le talent est incontestablement moindre, mais dont la réussite est plus éclatante. On pense notamment à George Du Maurier et Constance Fenimore Woolson. Tout en jugeant ce succès immérité, et ne comprenant pas le goût du public, il ressent à la fois jalousie et amerturme, mais la sincérité de son amitié envers ces rivaux littéraires n'en est pas affectée.

Chose intéressante que ce texte : c'est un roman, mais il a une forte saveur biographique : « Presque tout ce qui se passe dans ce roman est fondé sur des sources formelles ». Et pourtant, tout le long de la lecture, j'avais l'impression que le sujet principal, bien qu'invisible, est bien davantage Lodge que James. Ou plutôt une espèce d'identification de leurs deux destins.

J'ai crû trouver confirmation de ce sentiment quand, vers la fin du livre, James, écrivant un article sur son ami Du Maurier, récemment décédé, s'aperçoit « qu'il s'agissait autant de lui que de Du Maurier... » Et dans le dernier chapitre, Lodge intervient dans le cours du récit (passages marqués en italiques), s'adressant directement à celui qui vient de mourir, et dont la renommée devra attendre encore quelques décennies.

Pourtant Lodge a connu, et depuis longtemps, un assez grand succès pour ses romans; peut-être toutefois souffre-t-il de que que la critique ne le tienne pas pour un auteur sérieux, du genre de James, justement, un auteur qui dure... En tout cas, il n'a certes pas connu beaucoup de succès avec ce roman, face à son rival et concurrent Le Maître, de Colm Toibin.

Lequel des deux la postérité retiendra-t-elle ? Je ne saurais me prononcer, mais j'avoue que le Toibin m'a davantage séduit que le Lodge. Quoiqu'il en soit, on pourrait trancher en recommandant de revenir à James...

Mais je vous recommande vivement la lecture des essais de Lodge Dans les coulisses du roman.

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